jeudi 1 décembre 2016

Jeudi 1er  décembre 2016 au Colisée  de Mascara  à 18h00



Projection du film "Le voleur de bicyclette"







Le Voleur de bicyclette (titre original : Ladri di biciclette) est un film italien de Vittorio De Sica sorti en1948. Le film retrace l'histoire d'un père de famille pauvre de l'immédiat après-guerre qui s'est fait voler l'outil de travail indispensable à la survie de sa jeune famille, sa bicyclette.
Adapté pour le cinéma par Cesare Zavattini du roman de Luigi Bartolini avec Lamberto Maggiorani dans le rôle du père désespéré et Enzo Staiola dans le rôle de son courageux jeune fils, Le Voleur de bicyclette est considéré comme un des chefs-d'œuvre du néoréalisme italien.

Synopsis

Antonio Ricci, quarante ans, vit dans une banlieue populaire de Rome, à Val Melaina, avec sa femme et ses deux enfants. Au chômage depuis deux ans, il a finalement la chance de trouver un emploi de colleur d’affiches, à condition qu’il ait une bicyclette. La sienne étant gagée au mont-de-piété, Maria, sa femme, y porte trois paires de draps afin de récupérer l’indispensable vélo. Le lendemain matin, il se rend à son travail, accompagné de Bruno, son fils de 7 ans, qui travaille dans une station-service. Ce même matin, alors qu’il a commencé sa tournée, sa bicyclette lui est volée, anéantissant d’un coup tous ses espoirs. Vainement, il se lance à la poursuite du voleur dans les rues de Rome, il doit se résoudre à porter plainte auprès de la police, qui lui laisse peu d’espoir.
Enzo Staiola dans le rôle de Bruno
Le lendemain dimanche, avec son fils, son ami Baiocco et deux autres compères, ils vont au marché aux puces de laPiazza Vittorio, où pourrait se trouver le voleur désirant vendre le vélo. Ils trouvent un vélo qui semble celui d'Antonio auprès d'un revendeur, font appeler un policier pour vérifier le numéro de série mais il ne correspond pas. Après d’infructueuses recherches, Antonio se rend au marché de Porta Portese et aperçoit le voleur en pleine discussion avec un mendiant. Le garçon s’enfuit et le vieux mendiant ne veut rien dire, Ricci le harcèle jusque dans l’église pendant un office destiné aux pauvres. Le vieil homme ne dit rien et Bruno fait des reproches à son père. Ce dernier, excédé, gifle son fils mais il s'excuse immédiatement.
Antonio demande à son fils de l'attendre près d'un pont pendant qu'il recherche le vieil homme, lorsque soudain il entend les cris de gens qui disent qu'un garçon est en train de se noyer. Se ruant sur les lieux, il se rend compte que ce n'est pas Bruno. Antonio propose à Bruno de déjeuner au restaurant, où ils oublient momentanément leurs problèmes, mais en voyant une riche famille se régalant devant un fin repas, il est de nouveau ramené à sa précarité et torturé par la perspective de redevenir chômeur.
Désespéré, Antonio consulte une voyante qui lui dit : « Tu trouveras ton vélo aujourd'hui, ou jamais ». En quittant la maison, le hasard lui fait retrouver son voleur qui se réfugie dans un bordel. Expulsés par les femmes, les hommes du quartier se liguent contre Ricci qui doit s’en aller. Il va chercher un carabinier, qui inspecte l'appartement du voleur, sans résultat, et explique à Antonio que sans témoin pour lui et avec le voisinage comme alibi pour le voleur, il ne peut rien faire.
Désabusé, il erre avec son fils du côté du Stadio Nazionale PNF où a lieu un match de football, tandis qu'à l'extérieur une nuée de bicyclettes attendent leurs propriétaires sur le parking. Il fait les cent pas distraitement alors que Bruno est assis sur le trottoir, son chapeau dans les mains. Il regarde de nouveau le parking et voit la foule de propriétaires récupérer leur vélo dans un flot ininterrompu. Il se dit que le monde est rempli des bicyclettes des autres. Il se remet à faire les cent pas, angoissé et agité, puis donne à Bruno de l'argent pour prendre le tramway et lui demande de l'attendre à Monte Sacro.
Antonio tourne autour d'une bicyclette qui semble abandonnée et, rassemblant son courage, s'en empare, mais il est rattrapé par des passants. Bruno, qui a raté le tramway, revient vers son père. Malmené par les personnes qui l'ont appréhendé, son chapeau roule par terre. Bruno le ramasse et essaye de le rendre à son père. Finalement, le propriétaire, dans un moment de compassion, décide de ne pas porter plainte, il est relâché, par pitié.
Ricci est libre, honteux, tandis que son fils, en pleurs, tient son chapeau dans la main. Ils se regardent brièvement. Antonio retient ses larmes. Bruno lui prend la main et le film se termine sur l'image de ce père qui continue son chemin vers l'inconnu, le bruit, la foule, la rue, l'incertitude du lendemain la plus totale. Ce film est souvent présenté comme l'archétype du néoréalisme italien.

Fiche technique

Distribution

Production

Une scène du film
Le Voleur de bicyclette est l'œuvre la mieux connue du néoréalisme italien, un mouvement initié par Roberto Rossellini en 1945 avec Rome, ville ouverte et qui tente de donner au cinéma un style beaucoup plus réaliste. De Sica vient tout juste de réaliser le très controversé Sciuscià et il est incapable d'obtenir le soutien financier de studios importants pour son film. Aussi il finance son projet lui-même et avec l'aide d'amis1. Son projet est de montrer le chômage et la pauvreté de l'Italie de l'après-guerre. Pour cela, il choisit un roman de Luigi Bartolini comme base générale pour son scénario qu'il co-écrit avec Cesare Zavattini et d'autres1. Suivant les principes du néoréalisme, De Sica tourne seulement en décors extérieurs naturels dans les rues de Rome (aucune scène en studio) et avec des acteurs non professionnels (Lamberto Maggiorani, par exemple, est un ouvrier d'usine). De Sica cherche à recréer un parallèle entre leurs vies réelles et leurs vies à l'écran toujours dans l'optique de plus de réalisme2. De Sica auditionne Maggiorani alors que ce dernier amène son jeune garçon pour auditionner. Plus tard, il auditionne Enzo Staiola, âgé de huit ans, qu'il remarque en train d'aider son père à vendre des fleurs, lors de ses repérages dans les rues de Rome. La scène finale dans laquelle Antonio et Bruno s'éloignent de la caméra en marchant main dans la main est un hommage à de nombreux films de Charlie Chaplin qui est un des réalisateurs préférés de De Sica3.
Parallèlement, il prend des contacts à Hollywood, et notamment avec le producteur David Selznick qui, s'étant déclaré intéressé, veut imposer Cary Grant dans le rôle d’Antonio Ricci. Le réalisateur trouve finalement les moyens nécessaires en Italie et tourne dans les rues de Rome avec des acteurs non professionnels.

Traduction du titre

Les pluriels de ladri et de biciclette dans le titre original étaient particulièrement signifiants : loin de s'en tenir à décrire le parcours d'un seul voleur de bicyclette, le film dressait symboliquement le constat plus global du marasme social de cette Italie d'après-guerre. La question sous-jacente posée par le titre était donc : « l'Italie n'est-elle plus peuplée que de voleurs de bicyclettes ? », une nuance perdue dans la traduction française.[réf. souhaitée]

Commentaires

En cette période d’après-guerre, le néoréalisme s’impose dans une Italie vaincue. Le Voleur de bicyclette, au même titre que Rome, ville ouverte de Roberto Rossellini, est emblématique d’un cinéma qui se veut plus proche de la réalité : tournages en extérieur dans des décors naturels, lumières naturelles, acteurs non professionnels. Consacré à la pauvreté, au chômage et à la vie dans les banlieues populaires, on a parfois conféré à ce film une valeur quasi documentaire.
À sa sortie en Italie, il suscite une polémique, les communistes lui reprochant de n’être qu’une peinture de la vie des classes les plus pauvres sans apporter de propositions, et d’autres lui reprochant son misérabilisme[réf. nécessaire]. Le film connaît un grand succès international. Woody Allen le considère comme le plus beau film de l'histoire du cinéma4.

Récompenses



jeudi 24 novembre 2016

Jeudi 24 novembre 2016 au Colisée  de Mascara  à 18h00



Projection du film "Innocent"




Drame, Guerre de Nationalités Américano, Mexicaine

De Luis Mandoki
Avec Carlos Padilla, Léonor Varela, Xuna Primus .


Synopsis :
Inspiré par l’histoire vraie du scénariste Oscar Torres, ce film relate l’histoire d’un enfant de 11 ans, Chava, au Salvador dans les années 80. Le pays est agité par des tensions internes et les forces armées gouvernementales sont en lutte contre les rebelles du FMLN. L’armée enrôle dans ses troupes des enfants dès l’âge de 12 ans. Pour Chava, il reste un an avant de devenir à son tour un soldat.

Critique du Film

En 1980, la guerre civile au Salvador fait rage entre l’armée salvadorienne et les guérillas composées essentiellement de paysans. Les batailles rangées se déroulent au cœur des villages d’occupants prient entre deux feux, et dont les morts se comptèrent par milliers. Vivant dans des maisons construites avec du bois et des tôles de fer, ils étaient soumis à un couvre-feu strict, s’endormant aux sons des tirs de nuit. Dans ce climat terrible, Chava vit avec sa mère Kella (Leonor Varela) une couturière, sa sœur et son frère cadet. Lorsque la guerre a débuté, son père s’est enfui aux États-Unis, et depuis lors, Chava est devenu l’homme de la maison. Dans un corps d’enfant, le petit Chava mûri plus vite prenant sous son aile la sécurité et la charge de sa famille. Alors que sa mère est au travail en ville, la maison est prise dans le feu nourri. Chava parvient alors à sauver son frère et sa soeur des coups de feu déchirant l’air et les murs de leur maison balbutiante. Quand elle rentre ce jour-là, Kella décide de travailler de sa maison avec sa propre machine à coudre. À l’école, Chava devient le petit ami de Cristina et décroche un emploi à temps partiel sur un bus. Fier de donner l’argent à sa mère, ce petit quotidien ne tient qu’à la fréquence des accrochages dans la ville.

Innocent
 est un film sur l’innocence brisée de milliers d’enfants. En lieu et place de jouer aux bords de l’eau, à la balle au travers d’une rue ou de manger des bonbons accompagnés de la fille de leur rêve, ils rentrent de l’école en évitant les balles d’armes automatiques, passent au-dessus des morts gisant dans les forêts avoisinantes. Mais le quotidien de ces enfants est ce stress du service de l’armée, qui oblige tout enfant de plus de quand douze ans à être enrôlé de force.
La puissance d’Innocent réside dans sa description impitoyable de la vie des enfants et des femmes dans cette guerre sanglante du Salvador dans les années 1980. Prenant le point de vue platonique d’un petit garçon angélique, Luis Mandoki (Une bouteille à la mer, Angel Eyes) se repose beaucoup trop sur une dramaturgie superficielle à base d’envolées musicales et de gros plans sur Chava, les yeux mouillés emplis d’une terreur bluffante. Basé sur la vie du co-scénariste du film, Chava n’est autre qu’Oscar Torres, acteur américain, qui à travers ce scénario, a souhaité retranscrire son histoire poignante. Mais outre son histoire, les deux scénaristes ont voulu mettre à travers ce film l’accent sur le recrutement d’enfant dans ces conflits. Actuellement, plus de 300.000 enfants servent dans les armées de plus de 40 pays.

Long parfois même ennuyeux par la multiplication de séquences inutiles,
 Innocent reste tout de même un beau témoignage sur l’innocence perdue d’enfants impliqués dans un conflit oublié ou méconnu.Mais ces agissements et le déroulement du conflit ne quitteront jamais les simples yeux de Chava. Notre vision se limitant à ce qui est vu et compris par le jeune garçon. Le conflit en lui-même n’est jamais réellement expliqué dans ses complexités historiques ou sociales. Car les affrontements remontent à plus de 20 ans et se sont presque déroulés dans une discrétion innommable. Peut-être pas l’intention première des deux auteurs, le film fini marquera toute absence de compréhension et donc de réelle empathie. Malgré tous les efforts de Mandoki à nous embarquer dans un mélodrame puissant, on reste constamment en dehors du propos regardant le long-métrage avec une distance froide. Là où Le Tombeau des Lucioles ou Jeux Interdits nous prenait à la gorge et aux tripes faisant couler toutes les larmes de notre corps par cette immersion brutale et intransigeante d’un conflit bien plus proche de nous, Luis Mandoki abuse de subterfuges superficiels pour nous tirer la moindre larmichette. Alors oui, l’identification à ce petit garçon est prenante, la plongée dans son regard perdu entre innocence et cauchemar étant captivant, mais jamais Mandoki, par le biais de sa caméra, nous déchire le ventre par une réalité abjecte.

jeudi 17 novembre 2016

Jeudi 17 novembre 2016 au Colisée  de Mascara  à 18h00



Projection du film "Where to invade next"





Where to Invade Next

n
Where to Invade Next est un film documentaire américain réalisé par Michael Moore, sorti en 2015. Il est présenté au Festival international du film de Toronto en 2015. En Europe, il est présenté à la Berlinale 2016dans la section Berlinale Special1.

Synopsis

Les États-Unis ont toujours fait la guerre pour prendre des richesses aux pays vaincus. Les guerres contre l'Irak et le Vietnam ont été perdues. Et si les Américains, représentés ici par Michael Moore, allaient « envahir » l'Europe pour y « voler » les bonnes idées, plutôt que le pétrole ou l'or...

Fiche technique

Distribution


Jeudi 17 novembre 2016 au Colisée  de Mascara  à 18h00



Projection du film "Where to invade next"





Where to Invade Next

n
Where to Invade Next est un film documentaire américain réalisé par Michael Moore, sorti en 2015. Il est présenté au Festival international du film de Toronto en 2015. En Europe, il est présenté à la Berlinale 2016dans la section Berlinale Special1.

Synopsis

Les États-Unis ont toujours fait la guerre pour prendre des richesses aux pays vaincus. Les guerres contre l'Irak et le Vietnam ont été perdues. Et si les Américains, représentés ici par Michael Moore, allaient « envahir » l'Europe pour y « voler » les bonnes idées, plutôt que le pétrole ou l'or...

Fiche technique

Distribution


jeudi 3 novembre 2016

Jeudi 3 novembre 2016 au Colisée  de Mascara  à 18h00


Projection du film documentaire "Ici on noie les algériens"




Un film sur la tragédie du 17 Octobre 1961 en France

" Ici, on noie les Algériens". Le slogan, écrit sur un parapet, le long de la Seine, est aussi le titre du film de Yasmina Adi. Cinquante ans après les événements du 17 octobre 1961, la réalisatrice tente de faire la lumière sur la répression sanglante d’une manifestation d’Algériens qui protestaient contre le couvre-feu. Son but : « révéler la vérité » et la rendre accessible au grand public. 

Paris, bord de Seine, la nuit. Flûte berbère... L’eau clapote sous un rayon de lune. A l’arrière d’une voiture, sur le pont, une vieille femme se souvient : « Il en a mangé ce fleuve. Il en a pris des hommes… » Elle évoque ses enfants : « Mohamed, Kamel sont restés orphelins. Aïsha et Malika pleurent toujours... Quand on frappait à la porte, ils accouraient : « Voilà Papa !» Chaque fois qu’elle passe par là, elle implore le Seigneur : « Fais de moi une plongeuse que je retrouve ses os. Que je puisse l’enterrer dignement. » Le décor est planté. Cinquante ans après la manifestation d'Algériens, le 17 octobre 1961, brutalement réprimée, à Paris, une chape de plomb pèse toujours sur ces événements.

« 30 000 Nord-africains » auraient manifesté

Fourgonnettes de polices devant le Gaumont-Théâtre, voitures cassées boulevard Poissonnière dans le 2ème arrondissement, des photos d’archives en noir et blanc nous plongent dans la réalité de la France de l’époque. Des hommes, mains sur la tête, Place de l’Etoile, sont entourés des forces de l’ordre. Une voix nasillarde à la radio résume les faits : « Plusieurs nuits durant, les forces de police sont restées en état d’alerte à Paris à la suite de manifestations auxquelles ont pris part 20 000 musulmans algériens. » Le ministre de l’Intérieur, Roger Frey, parle plus tard de « 30 000 Nord-africains qui auraient participé à cette manifestation contre le couvre-feu ». Le bilan officiel (qui tient toujours en 2011) est de 3 morts et 64 blessés. Mais les bilans officieux varient entre 100 à 200 morts.


Confrontation d’archives


Comment une telle répression a-t-elle pu avoir lieu en plein cœur de Paris ? En filigrane dans le film : un contexte de fortes tensions. Nous sommes trois ans après l’arrivée du général de Gaulle au pouvoir, à quelques mois de l’indépendance de l’Algérie par les accords d’Evian (18 mars 1962), signés entre le gouvernement français et le Front de libération nationale (FLN) algérien, accords qui ont marqué la fin d’une guerre d’indépendance débutée le 1er novembre 1954. Les négociations ouvertes six mois plus tôt avec le gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) sont au point mort. Et le FLN appelle à une manifestation « pacifique » à laquelle participent femmes et enfants. Elle fait cependant suite à des attentats meurtriers contre des policiers (11 morts), d’où le couvre-feu imposé par le préfet Maurice Papon aux « Français musulmans d'Algérie » pour « mettre un terme aux agissements criminels des terroristes ».
La réalisatrice, Yasmina Hadi, a effectué deux ans d’enquête pour rassembler ce matériel varié fait d’archives – de rapports officiels, d’articles de presse écrite, filmée et sonore, d’agences photos. Elle a retrouvé aussi de témoins de l’époque. De tels récits demeurent encore tabous, tant au sein de la communauté algérienne que de la société française. D’où l’émotion de certains témoins devant la caméra, qui souligne la dimension humaine de ces « mères courage » par exemple, comme les appelle affectueusement la réalisatrice. Son but : apporter des informations croisées et recoupées, « pour respecter au mieux la vérité historique et démêler la trame des événements ».
Presque heure par heure, le film confronte la version officielle avec des images inédites et identifie les « moments-clés de la répression ». Ainsi, un journaliste d’Inter-Actualités rapporte « les cris hostiles, les slogans FLN, les voitures malmenées, retournées » avant d’affirmer : « Des coups de feu claquent chez les manifestants. Les forces de l’ordre ripostent ». Des propos démentis par une activiste de l’époque, qui se défend : « On était là pour réclamer nos droits mais pas pour casser. (…) On n’avait le droit de rien faire. Alors, nous et nos frères sommes sortis manifester pour la levée du couvre-feu. »

« Ils nous avaient barré tous les accès »

Surprenantes aussi, ces archives inédites de la salle de commandement de la préfecture, qui échange avec les policiers sur le terrain. Dans la salle en ogive à plusieurs étages où se superposent des bureaux vitrés, les renseignements généraux sont à l’œuvre. Un informateur annonce : « Le FLN a ordonné à tous les Algériens de sortir ce soir manifester sur tous les grands axes de circulation de la capitale… » Information transmise à l’état-major. Les points de rassemblement sont nombreux : Place de l’Etoile, Place de la Concorde, Grands Boulevards – d’Opéra à Bonne Nouvelle – et Saint-Michel. On les voit pointés au bout de la perche de cet agent, debout devant un plan de Paris qui occupe tout le mur.
Des témoins racontent le quadrillage policier dans les rues, mais aussi en amont, dans les immeubles, relayé par des concierges qui conseillent aux Algériens de « ne pas sortir ». La vieille militante : « Ils nous avaient barré tous les accès. Les gens venaient de partout : Saint-Denis, Gennevilliers, Nanterre, Colombes. » En autobus, en métro, à pied… Sur le Pont de Neuilly, la foule est immense en direction de Paris. Mais soudain, des gens se mettent à refluer, en panique. « On a entendu des coups de feu. » (…) « Fuyez, des policiers tuent les gens et les balancent dans la Seine ».
Au QG des RG, les forces de l’ordre réclament des renforts. Les arrestations se multiplient devant l’Olympia, aux Folies Bergères. Les dérapages vont de pair. Une femme aux cheveux blancs témoigne. Elle a vu à la Concorde des gens face au mur, sur le quai, mains sur la tête, en état d’arrestation, surveillés par des policiers armés de matraques. Autre témoin, un vieil homme, qui atteste avoir vu entre Notre Dame et Saint-Michel trois personnes jetées dans la Seine, un par-dessus le parapet et deux autres sur le quai. « Jetés. Les gens ne sont pas tombés d’eux-mêmes. »
Aux RG, un policier raconte que des journalistes de l’Aurore ont été empêchés de photographier un groupe de 500 Algériens parqués dans le tunnel du métro à Concorde. Un commandant du 5e district affirme qu’il a dû intervenir à Concorde car les responsables ne tiennent pas leurs troupes. En pleine Guerre d’Algérie, les forces de l’ordre sont habituées à « casser du bougnoule ».

Venus des 89 bidonvilles autour de Paris

Manque de cargos et de panier à salade… Qu’à cela ne tienne. Les manifestants arrêtés sont convoyés par des bus de la RATP : parqués comme des sardines. « On ne savait pas où on allait », disent les rescapés. La peur au ventre, ils sont passés à tabac, blessés. Le lendemain, la presse y va de son commentaire « Ils ont pris le métro comme on prend le maquis », ironise Paris Jour. Premier bilan : 11 538 arrestations. Jusque dans les bidonvilles, des contrôles de police continuent les jours suivants.
Le film de Yasmina Hadi reste très pudique sur la condition de vie des immigrés algériens en 1961. A peine quelques photos pour aiguiser notre imaginaire. En 1963, 43 % des Algériens de France vivaient dans des bidonvilles. Celui de Nanterre, un des 89 bidonvilles autour de Paris, abritait près de 10 000 Algériens. Venus de l’autre bord de la Méditerranée avec leurs familles, ils ont fui la misère des campagnes encore aggravée par la généralisation de la guerre, et répondu aussi à l’appel de main-d’œuvre en métropole en cette période des Trente Glorieuses. Avec les Portugais et les  Espagnols, les Maghrébins formaient l'essentiel d'une main-d'œuvre abondante, très peu qualifiée et bon marché. Parmi les « Français musulmans » qui bénéficiaient de la liberté de circulation jusqu'en 1962, les immigrés algériens étaient environ 600 000 en 1965.

« Conduits dans des foyers sociaux »

C’est de ces bidonvilles, aux périphéries de Paris, que sont partis les manifestants. De là que, très vite aussi, la rumeur s’est répandue selon laquelle des gens n’ont pas réapparu. Des gens dont on n’a aucune trace. Soucieux d’équilibre, le film produit cependant des témoignages d’autres manifestants sauvés par des inspecteurs de police plus scrupuleux. Ou des témoignages d’infirmiers faisant part des traitements inhumains de ceux qui affluent au stade. Ils rapportent leurs cris voire leurs hurlements. Emmenés pour contrôle d’identité, ils sont bousculés dès leur arrivée tant par des supplétifs que par des gendarmes, des CRS ou l’armée. La consigne des RG : ne pas dire qu’ils sont arrêtés mais « conduits dans des foyers sociaux ».
Un nouveau bilan de Roger Frey, ministre de l’Intérieur, indique qu’ils étaient 6 600 parqués comme du bétail au Palais des Sports de la Porte de Versailles, 1 800 au Stade de Coubertin et 660 à Vincennes. Les agitateurs, dument pointés sur les listes, seront renvoyés en Algérie.
Plus tard, devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre, Michel Debré, parle de 14 000 musulmans algériens arrêtés, sur lesquels 11 000 ont été relâchés et 500 qui le seront dans les prochains jours… L’opposition a réagi. Jacques Duclos puis Gaston Deferre rendent responsable Roger Frey de ces événements et de l’attitude de la police et réclament une commission d’enquête parlementaire… Jean-Paul Sartre manifeste, avec les porteurs de valises. Toute une histoire. Quant au nombre de victimes, il reste incertain. Jetés dans la Seine, tués par balle ou morts le crâne fracassé par des manches de pioche ou des crosses de fusils ? Les familles de 90 de ces personnes, mortes ou portées disparues, réclament toujours officiellement à la France d’être enterrées dans la dignité.

Antoinette Delafin